Patrimoine. Allumage du four banal d'Urval et cuisson du pain
La page patrimoniale d'aujourd'hui, sera entièrement le fruit de Bruno Marty qui s'est pris de passion, une de plus, pour le four banal d'Urval. Urval, tout petit village qui borde le Peyrat, mérite d'être connu, ou mieux connu, car cette niche du départ de la RD 52, à l'écart de la RD 25, voie départementale de la vallée de la Dordogne, n'est dérangée que par les flux locaux de circulation ; et, là, on mesure le temps dans le calme d'une vallée sylvestre en lisière de Bessède. Un petit mot sur le fournier. Le patronyme de Fournier tombe sous le sens, c'est un aptonyme qui désigne l'homme du four. Pour nos ancêtres qui ne parlaient pas le français mais la belle langue occitane, le boulanger n'existait pas. Le brave concepteur du pain était le fournier. Les occitanistes orthodoxes disent que l'introduction du boulanger, dans leur belle langue, n'est qu'une dérive de notre temps, un peu comme aujourd'hui, on massacre le français en disant flyer pour désigner un prospectus. Ce terme, lui-même, est relativement récent, premier quart du XVIIIe siècle, prospectus, terminologie latine ("perspective, vue d’ensemble") avec, pour le français, le sens initial de "document d’annonce d'un livre ". En attendant, laissons-nous guider par le reportage qualitatif de Bruno sur le pain, le fournier et le décor heureusement préservé du four banal d'Urval. Il serait bigrement intéressant qu'un historien bénévole revienne sur ce blog, pour nous parler de ces fours qui sont des lieux où nos ancêtres transmettaient leur savoir-faire pour ce lien indispensable de notre culture, le pain. |
URVAL : ALLUMAGE DU FOUR BANAL ET CUISSON DU PAIN
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Le week-end dernier, je me suis rendu à Urval, un charmant petit village champêtre situé dans un écrin de verdure.
En effet, ce dimanche, le fameux four à pain banal du bourg a été réactivé pour les journées européennes du patrimoine. Une première, car, normalement, il ne fonctionne que l’été, à l’occasion de la fête du village, le deuxième weekend d’août.
Ce four banal, classé monument historique depuis 1941, date du XIVème siècle. Il a conservé sa toiture de pierres jusqu’en 1853, date à laquelle il a été recouvert de tuiles. En 1962, une restauration du bâtiment a été effectuée sous la direction de Jean Meunier, architecte des Bâtiments historiques par des artisans locaux : Paul Delpech, charpentier de Siorac-en-Périgord, Albert Salanier, menuisier, et Jean Marès, maçon d’Urval. Le four lui-même est resté en bon état. Des travaux de rénovation de la toiture ont été réalisés en 2017.
La manifestation s’est parfaitement bien déroulée par un temps magnifique, qui plus est. Plusieurs dizaines de personnes ont assisté avec une grande attention, à cette ancestrale et traditionnelle cuisson du pain et sont reparties enchantées, avec une belle tourte sous le bras.
Opération de nettoyage de la surface intérieure du four.
Photo © Bruno Marty
Les tourtes dans le banneton sont prêtes. On les saupoudre de farine juste avant la cuisson.
Photos © Bruno Marty
C’est parti ! Les tourtes sont soigneusement posées sur une longue pelle à enfourner, en bois, avant leur positionnement définitif à l’intérieur du four.
Photos © Bruno Marty
Le fournier pratique, ici, la scarification à l’aide d’un coupe pâte, de la tourte avant l’enfournement.
Photos © Bruno Marty
Les deux artisans boulangers en plein travail.
Photo © Bruno Marty
Après une cuisson d’environ quarante cinq minutes, les tourtes sont bien cuites et ont pris une appétissante couleur mordorée.
Photo © Bruno Marty
Les deux artisans retirent les tourtes afin de les présenter à la vente. Du bel ouvrage.
Photos © Bruno Marty
Une file d’attente s’est spontanément formée. Les tourtes ont facilement trouvé acquéreurs, au vu de la panière qui se vide à la vitesse grand V.
Photo © Bruno Marty
Photo du haut : le four à pain banal d’Urval (photo prise en 1987).
Les tourtes sorties du four étaient rangées sur les étagères qui ornent la façade du bâtiment. Un pigeonnier accolé à ces étagères, permettait au fournier de faire un élevage.
Photo du bas : le même four (photo prise ce dimanche 16 septembre 2018).
Le four a encore été utilisé pendant la guerre de 1914-1918. Il a été remis en service lors des fêtes médiévales dans les années 1970, par Pierre Mauléon, boulanger à Siorac en Périgord.
Photos © Bruno Marty
Photo du haut : au-dessus du four, se trouve le logement du fournier.
Photo du bas : l’intérieur est doté d’une cheminée et cette pièce servait également à pétrir la pâte.
Photos © Bruno Marty
Petit historique sur le four banal au Moyen Âge.
Le ban : pouvoir de commandement
Au Moyen Âge, les grands propriétaires exerçaient, dans le système féodal français, un droit général de commandement qu’on appelait ban. Le droit de ban permettait au seigneur d’imposer aux habitants de la seigneurie, l’obligation d’utiliser de façon exclusive le four, le moulin, le pressoir que lui-même avait édifiés. Cela donnait lieu à un impôt en argent ou en nature appelé "banalité". Ces installations étaient sources de profit pour le seigneur, soit directement, comme dans le cas des banalités (de four, de pressoir, de moulin), soit indirectement en raison des amendes qui sanctionnaient toute désobéissance au ban. Ces privilèges, abolis et déclarés rachetables dans la nuit du 4 août 1789, seront abolis définitivement sans rachat en 1793.
Le four banal
Pour le pain, les habitants devaient utiliser le four seigneurial dit "banal" et payer un droit de "fournage". C’est-à-dire, remettre une partie de leur production au seigneur, en général, un pain sur vingt ou sur trente. C’était un asservissement tant le four à pain était indispensable à la vie quotidienne.
En contrepartie, le seigneur avait pour devoir d’entretenir son four et d’y installer un fournier (boulanger) qui était chargé de cuire le pain et de prélever l’impôt. Les habitants apportaient leur farine plusieurs jours à l’avance. Ils la marquaient en indiquant le jour du dépôt et donnaient en échange, une bûche de bois pour la cuisson.
Photo du haut : l’église Notre Dame de la Nativité (XIe, XIIe et XIIIe siècles) avec sa partie fortifiée, classée monument historique depuis 1926.
Photo du bas : une petite cabane en pierres sèches (gariotte) juchée sur l’imposante façade empierrée des jardins du presbytère.
Photos © Bruno Marty
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