Terres de Nauze

Nos haies champêtres. Tribune verte de Michel Ribette

 

La haie, jadis, symbolisait l'aisance du propriétaire.

Aujourd'hui, elle est devenue un laboratoire de biodiversité.

 

Aujourd'hui, notre ami Michel Ribette, l'ami des oiseaux, mais pas seulement des oiseaux, veut nous emmener à observer les haies. Les haies sont des structures végétales linéaires, associant arbresarbustes et arbrisseaux (fruticée), sous-arbrisseaux et autres plantes indigènes qui poussent librement, ou sont entretenus pour former une clôture entourant une unité foncière, ou pour constituer un abri à une faune locale et une flore spécifique formant un biotope particulier.

 

Les haies champêtres ont quasiment toutes, disparu. C'est bien dommage car, au-delà de l'harmonie paysagère, elles contribuaient à la rétention des sols, à l'équilibre naturel et, dans une moindre mesure, limitaient l'assèchement des parcelles en période caniculaire.

 

Les haies, enserrant un patrimoine foncier plus intime, attestaient, certainement, le caractère privatif mais avec tellement plus de panache que les contemporaines kyrielles de panneaux "propriété privée", parfois assortis de l'autoritaire prescription "défense d'entrer". Ces doctrinaires interdictions proscrivent fermement les tolérances permissives d'antan.

 

Beaucoup de ces haies, parfois multiséculaires, hélas, ont disparu un peu tôt. Les concepteurs d'engins de jardinage ont mis sur le marché, leurs outils, un peu trop tard et bon nombre de ces haies avaient été radiées quand ces taille-haies thermiques ou électriques se sont vulgarisés.

 

P.F

 

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NOS HAIES CHAMPETRES,

des Arches de Noé à deux pas de chez nous

par Michel Ribette

 

 

C’est en traversant le centre de notre pays et ses immensités céréalières d’une angoissante monotonie, que l’idée de consacrer quelques lignes aux haies, m’est venue.

Si elles ne sont pas à proprement parler, des biotopes typiquement sauvages, car souvent plantées par l’homme, penchons-nous sur leurs multiples attraits parmi lesquels leur indéniable esthétisme dans l’harmonie de nos campagnes. Véritables entités paysagères, elles dynamisent nos milieux ruraux et témoignent que leur existence est intimement liée à nos activités ancestrales.

 

 

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Mais certains exploitants, pris dans l’engrenage du besoin de produire plus et davantage encore (et pas forcément meilleur), ne font plus cas de ces éléments embellissant nos campagnes. Véritables forêts linéaires, devenues des obstacles au passage d’une nouvelle génération d’imposants engins agricoles, elles disparaissent de certaines zones. Mais, à présent, une majorité du monde agricole semble regarder d’un autre œil, ces taillis et bocages en les considérant comme des alliés plutôt que des contrariétés pour leurs activités.

 

 

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On suppose que les hommes érigèrent ces barrières végétales à compter du XVII siècle. D’abord, dans le but de marquer le territoire de chacun, elles devinrent d’emblée des clôtures naturelles évitant la fuite du bétail. Elles permirent aussi d’être de précieux garde-manger, en produisant quelques mannes salutaires pour assouvir l’appétit du monde rural, aussi bien dans la production de baies et de fruits sauvages que de petits gibiers. Indéniablement, la production des haies apporta aussi des solutions aux carences alimentaires d’antan, notamment en apports de vitamines dont la C dans les fruits de l’églantier ou cynorrhodons, pour ne citer que celui-là.

Durant des décennies, l’entretien des essences arborescentes et arbustives produisit matière à se chauffer mais aussi à confectionner les bois entrant dans la confection de petits matériels agricoles.

 

            Progressivement, on a découvert et apprécié les rôles insoupçonnés de ces milieux particuliers. Comme on vient de le voir, les haies ne furent pas plantées au hasard mais bien dans le but de protéger les animaux d’élevage. Jouant le rôle de brise-vent, réduisant sa vitesse de 30 à 50 % et de parasol, elles offrent un confort de vie à notre bétail dont la production de viande et de lait s’en trouve améliorée de 20%.

La préservation des haies : - un atout pour l’agriculteur éleveur mais aussi pour l’agriculteur cultivateur.

Il n’est plus à prouver l’impact bénéfique de ces éléments devenus vitaux sur le rendement des cultures. Encadré par un maillage de haies entretenues, la productivité augmente de 30% comparativement aux mêmes cultures plantées en zones dépourvues de ces murs de végétaux. Une haie bien étanche aux assauts du vent, aura une incidence protectrice sur les cultures, 15 à 20 fois sa hauteur. Ce n’est pas rien.

D’autre part, la structure des haies exerce aussi dans nos campagnes, un rôle de capteur de chaleur durant la journée, chaleur restituée la nuit, permettant en hiver, la limitation des gelées.

La régulation des eaux de surface dépend également de la présence et de la bonne santé des haies ; car, il est aussi prouvé que ses composants stockent l’eau, qu’elles restituent lors des périodes de chaleur. N’avez-vous jamais constaté le contraste entre la verdoyance des plantes au pied des haies et le reste d’une parcelle exposée au soleil ?

Grâce à l’ancrage de leurs racines, nous pouvons également parler du blocage des terrains pentus, évitant ainsi toute érosion hydrique en cas de forte pluie et éolienne par fort coup de vent. Consécutivement à des remembrements anarchiques, combien de fois n’ai-je pas vu certaines communes replanter dans l’urgence, ces salutaires barrières végétales. Parfois, les erreurs ne purent se réparer, les terres ayant glissé dans le fond des valons, modifiant et pas pour leur bien, d’anciens ruisseaux aux eaux limpides.

Une autre fonction et non la moindre : - la filtration des eaux de ruissellement.

Situés en bordure de rivière, arbustes et strate herbacée entrant dans la composition de la ripisylve, filtrent, purifient et limitent l’impact des poisons phytosanitaires et autres pesticides toxiques épandus sur les cultures, sur la qualité des eaux de nos ruisseaux.

Leur feuillage joue aussi un rôle de régulateur de température pour nos cours d’eau où la truite apprécie les zones d’ombre bien oxygénées. Avec leur réseau racinaire, les haies maintiennent les berges, une solution plus appropriée et naturelle que les inesthétiques enrochements. L’efficacité des saules n’est-elle pas légendaire ?

Ces entités paysagères et culturelles présentent aussi l’indéniable intérêt d’être des réservoirs génétiques pour une grande variété faunistique. La haie, véritable écosystème à part entière, offre gîte et couvert à bon nombre d’oiseaux, mammifères, reptiles et insectes, bien souvent prédateurs de première ligne des parasites de nos cultures. A très peu d’espèces près, l’ensemble des acteurs de notre patrimoine naturel rural est hébergé au sein de nos haies.

Alors, regardons-les avec plus d’attention et d’intérêt, car leur disparition sonnerait le glas non seulement des vocalises d’oiseaux, de la qualité de nos produits agricoles, de l’harmonie de nos paysages, bref, de notre bien-être.

La présence de taillis ne signifie pas  un quelconque désordre devant lequel il faut se croire obligé d’intervenir à grands renforts de débroussailleuses et de tronçonneuses. Le monde sauvage n’a que faire de nos visions anthropomorphiques du correctement ordonné. La nature ne se suffit-elle pas à elle-même et cela, bien avant les prémices de l’humanité ?

Poires, pommes et prunes sauvages, mûres et cynorrhodons doivent encore longtemps pouvoir agrémenter le côté ludique de nos balades campagnardes. Laissons donc vivre les haies avec leur cortège de surprises naturelles qu’il nous appartient d’aller découvrir. Le grand Voltaire n’a-t-il pas écrit : « La nature t’appelle, apprends à l’observer ! ».

 

 

Restez curieux de Nature, elle est source d’émerveillement et… ne déçoit jamais.

 

Michel Ribette

pour Terres de Nauze- avril 2019

 

 

 

Les haies sont de véritables Arches de Noé sur le pas de nos portes. Jugez-en vous-même avec ces inventaires non exhaustifs. La biodiversité y est d’une extraordinaire variété qui vaut bien tout notre intérêt à la préserver.

Quelques essences qui composent la haie : l’alisier blanc ou poirier sauvage, l’aubépine, le charme, le cormier, le cornouiller sanguin, l’érable, le frêne, le fusain, le noisetier, le prunier, le pommier, le noyer, le merisier, le sorbier des oiseleurs, le sureau, la ronce, le troène, le tilleul, la viorne lantane, le néflier…

Quelques oiseaux des haies: la buse variable, le faucon crécerelle, le coucou, la corneille, le corbeau freux, la tourterelle des bois, le hibou moyen-duc, le faisan de Colchide, le chardonneret, la linotte mélodieuse,  les pies-grièches grise et écorcheur,  les fauvettes à tête noire, des jardins, babillarde et grisette, le tarier pâtre,  l'accenteur mouchet, les grives litorne et musicienne, les pics verts, épeiche et épeichette, les mésanges bleues, charbonnière et à longue queue,  les perdrix grise et rouge, le bouvreuil, le gros-bec, le verdier, les bruants jaunes, zizi et proyer, le geai, les gobe-mouches gris et noir, le grimpereau des jardins,  le merle noir, le rouge-gorge, l’hypolaïs polyglotte, les pouillots véloce et fitis, le rossignol philomèle, la huppe …

Quelques mammifères des haies: le chevreuil, le renard, le blaireau, la fouine, la belette, l’hermine, le lérot, le loir, le hérisson, les campagnols (sp), le lièvre, le lapin de garenne, le chat sauvage ou forestier, le muscardin, les chauves-souris (sp), le rat des moissons, les musaraignes (sp), le putois…

Quelques reptiles et amphibiens des haies: la salamandre tachetée, le crapaud commun, la couleuvre à collier, la couleuvre verte et jaune, la coronelle lisse, le lézard des souches, l’orvet, la grenouille rousse et la grenouille agile, le sonneur à ventre jaune, les tritons alpestre, palmé et à crête…

 

 

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Un musicien de la nature

 

 

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L'hôte d' un restaurant champêtre

 

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Un agent de maintenance des haies

 

 

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Il n'y a ni réfrigérateur, ni garde-manger dans les haies.

 

 

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Des visiteuses porteuses de vie

 

 

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Qu'ils sont mignons mais les lois de la nature les ont promus prédateurs.

 

 

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La haie peut, à l'occasion, lui servir de protectrice.

 

 

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La haie, lotissement de muscardins

 

 

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Si la nuit, tous les chats sont gris, dans la pénombre, le murin de Daubenton pour se nourrir, détruit les insectes. Les lois de la nature sont impitoyables !

 

 

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La rainette a besoin du vert des haies pour se protéger

 

 

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Les pièges des haies vont au secours des cultures.

 

 

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Le prochain support sera celui de Bernard Malhache, critique de théâtre à ses heures, par ailleurs ami de la nature et adepte de l'apiculture. Bernard, lui, n'a pas zappé la journée du Troc des plants comme votre serviteur. J'ai honte de mon oubli.

 

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21/04/2019
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