Vie courante. De grâce, abstenez-vous de dire "monsieur" en parlant de vous-même.
Certaines personnes, pour se présenter, surtout au téléphone, emploient "monsieur" pour parler d'elles-mêmes. C'est tout simplement grotesque, déplacé, incorrect et... stupide ; pourquoi ?
Monsieur
nom masculin
- 1.
Titre autrefois donné aux hommes de condition élevée.
- 2.
Titre donné à un homme à qui l'on s'adresse.
Bonjour, monsieur.
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" Monsieur " : une désignation empreinte de solennité renvoyant à une société aux fondations aristocratiques - (œuvre de jeunesse de William Bouguereau). Image Wikipédia |
Monsieur avait, surtout jadis, une superbe connotation emphatique (Ma mère veut que son Jacques soit un monsieur. "L'enfant", Jules Vallès).
Monsieur est l'agglutination lexicographique de mon, adjectif possessif, et du radical sieur, nom masculin qui a bien vieilli et qui n'est pratiquement utilisé qu'en droit. Aujourd'hui, encore, le sieur est employé dans le domaine juridique lors d'un plaidoyer ou de toute autre procédure de justice.
En s'adressant à quelqu'un, quel que soit le procédé, pour parler de lui-même, Jean Dubois devrait dire Jean Dubois et non Monsieur Jean Dubois. Cette tournure est, cependant, parfaitement correcte pour interpeller ou questionner cette personne. Monsieur Dubois, qu'en pensez-vous ?
En utilisant monsieur, pour parler de vous-même, vous risquez fort de passer, si vous vous adressez à quelqu'un qui connaît la règle, soit pour un prétentieux imbu de sa personne, soit pour quelqu'un qui ignore cette règle élémentaire et fondamentale et, là, vous pécheriez bien davantage si vous êtes un notable ou un personnage impliqué dans la vie sociétale, commerciale, managériale ou culturelle plutôt qu'un citoyen lambda qui peut ne jamais avoir entendu parler de cette particularité. Guillaume Quimpois, préfet honoraire, Grand-Croix de la Légion d'Honneur, afficherait une belle immodestie, s'il ajoutait Monsieur à ses prénom et nom.
Cette règle est de la même essence pour les dames.
Une documentaliste se présentera en déclinant ses prénoms et nom, et pas l'inverse. Elle ajoutera, seulement si c'est nécessaire, sa référence professionnelle. Pour une réservation de place pour un concert, Anne-Blanche Chaumade déclinera simplement son prénom composé suivi de son nom. Elle précisera documentaliste du Lycée Marcellin Berthelot, pour se situer, en s'adressant à l'hôtesse du cabinet du maire qui doit la recevoir.
Pour les jeunes filles, abstenez-vous de décliner une ridicule mademoiselle. Virginie Forestier, postulante pour un emploi saisonnier, sera certainement d'un bien meilleur effet qu'une singulière Mademoiselle Virginie Forestier. Si elle tombe sur une R.H. pointilleuse, elle risque fort, éventuellement à tort, de dévaloriser la candidate sur cette simple futilité.
Si vous êtes titré(e)s, quelle que soit la nature de vos références, citez d'abord votre prénom, suivi de votre nom et, ensuite, ajoutez vos références. Edwige Jonquière, conservatrice du Musée d'ornithologie du Littoral phocéen, sonnera certainement beaucoup mieux que Madame Edwige Jonquière, conservatrice du Musée.
À votre avis, si vous croisez un brillant avocat qui se présente Louis Planche, avocat, chargé du dossier X, pensez-vous qu'il aura perdu de la splendeur de son panache ou auriez-vous préféré l'entendre décliner, avec une certaine autosatisfaction, un Maître Louis Planche, avocat, chargé du dossier X ?
De nos jours, on a, notamment dans les interviews et dans les débats, tendance à faire l'impasse de la civilité. Une jeune journaliste ne sera pas du tout considérée comme impertinente si, interviewant Anne Hidalgo, maire de Paris, elle lui demande Anne Hidalgo, pensez-vous que vos mandants apprécieraient que la capitale devienne une cité exclusivement piétonne ?
N'en rajoutez pas.
Si vous donnez, par exemple lors d'une prise de parole, le nom d'une personnalité, ne dites pas Monsieur le préfet était accompagné de mais, tout simplement, le préfet était accompagné de. Naturellement, si vous, vous êtes amené à lui adresser la parole, vous lui direz Monsieur le préfet. Ne faites pas usage d'une vassalité rampante à l'usage des têtes couronnées. Sa Majesté X, roi de Y, dans l'usage diplomatique, a, peut-être, encore cours ; mais, dans la vie courante, de grâce, élaguons ! X roi de Y sonnera aussi juste et précis qu'une obséquieuse formule renforçant le privilège de naissance de ce personnage.
De même, que vous ayez des convictions religieuses ou non, il n'est pas du tout effronté ou irrévérencieux, dans la conversation, de parler d'André Vingt-Trois ou de Dali Boubakeur, sans entrer dans des précisions sur leurs titres religieux, de cardinal parisien ou de recteur de la Grande Mosquée de notre capitale. À ce jour, la Loi de Séparation de l'Église et de l'État n'est heureusement toujours pas abrogée.
Et pour nos défunts.
Cessez donc de dire Madame, Mademoiselle, Monsieur, pour un(e) défunt(e), on pourrait dire, si l'on ne passait pas pour un vieillot ringard puissance X, feu.
George Sand, Léon Blum, Albert Camus, Louison Bobet, Georges Pompidou, Pablo Picasso, Marcel Pagnol, Simone Veil, France Gall, Michel Serre -et tous les autres- sont réunis dans l'au-delà. Ne leur ajoutez pas une civilité qui ferait autant dissonante, ridicule et inadaptée, que si vous disiez Madame Olympe de Gouges ou Monsieur Pierre Curie.
Quelques fautes protocolaires à éviter.
Les personnes qui sont chargées d'agencer les salles de réunion, de jalonner les repères d'un couloir, de concevoir des plaques à fixer dans des espaces publics, ont trop souvent tendance, par un conformisme largement obsolète, à faire précéder les patronymes, de civilités.
Imaginons que, le 22 septembre 2031, la ville du Creusot, pour le cinquantenaire de l'inauguration du T.G.V, veuille rappeler que c'est dans cette ville que le chef de l'État s'est attardé pour marquer cette inauguration, le concepteur d'une plaque commémorative pourrait parfaitement écrire : "Ligne inaugurée, ici, par François Mitterrand, président de la République" et non par M. François Mitterrand.
Dans les chevalets de tribune ou de salle de conférence, évitez les civilités. Jacques Meyer, président de la communauté de communes de Monts du Berry ne sera pas déchu de sa masculinité, ni de ses prérogatives, s'il n'y a pas une civilité pour le situer.
Une plaque de marbre, indiquant que le chemin des tours a été inauguré par Xavière Dupin, présidente du conseil départemental de X, ne sacrifiera, en rien, la féminité de cette édile, ni ses mérites.
Dans l'élocution, soyons le plus simple et courtois possible, comme dans la vie. Nous ne serons taxés d'insolents que par celles et ceux qui s'appuient sur un conformisme d'un autre temps, périmé et, souvent, inadéquat.
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