La halle de Grives inaugurée.
GRIVES
Autorisons-nous un brin de ressassement d'antan. Quand, jadis, on cherchait à donner un peu d'humour champêtre à Grives, on disait volontiers Grives tout près de Merle.
Si l'étymologie de Merle nous vient non de l'oiseau mais de la marne, roche sédimentaire, mélange de calcite et d'argile issu de l'érosion des vieux reliefs de son socle, pour Grives, Grivas dans sa forme occitane, les érudits de l'onomastique ont estimé qu'il s'agirait plutôt d'un patronyme d'origine germanique. Pour la poésie, c'est un peu dommage que Grives ne soit pas une terminologie ornithologique dérivant du latin graecus qui nous vient de Grèce. Notre occitan, langue celto-latine s'il en est, comporte bien plus de racines grecques, parfois germaniques voire arabes, que l'on peut l'imaginer.
Grives, aujourd'hui, demeure un fort joli village où la pierre des maisons, comme à St Laurent ou à Carvès, signe le magnifique décor architectural rural qui donne une originalité locale à préserver. Grives, jadis, concourrait avec Carvès, Doissat et Sagelat pour le rang [en population] de troisième commune du canton mais l'exode rural du XIXème a mis fin à ce challenge. Les collines viticoles ont vu disparaître le vignoble ravagé par le phylloxera. L'école, où il y a bien longtemps, deux instituteurs d'exception Michel Giffault et Lucien Dutard, acquis à la Résistance, ont donné à leur mission, une portée hors du commun, comme tant d'autres écoles rurales, est devenue une volière sans oiseaux. Michel Giffault donna sa jeune vie à Tuilières face à l'occupant, le second, par ailleurs, siégea répétitivement à l'Assemblée nationale. Il innova, avant guerre, par la hardiesse de sa pédagogie ouverte et compréhensive qui voulait que l'enfant soit cœur de la vie scolaire dans un monde éducatif inspirant la confiance, le respect partagé, l'éveil, l'équilibre et l'harmonie. Un autre instituteur grivois, André Lavialle, s'effondra sous le tir d'un soldat du Reich, à Vézac.
Grives, jadis, fut un village qui emboîtait le renouveau avec sa grosse fête de printemps, équilibrée avec une fête estivale de hameau, en juillet, à Cravelle. Quand les automobiles étaient ou se faisaient rares, ou étaient limitées en carburant, l'autocar Belvès-Gourdon était, un peu, le régulateur du temps de ce bourg.
Grives a su garder longtemps, au cours des siècles, sa foire aoûtienne qui, signe des temps, comme tant d'autres, a pris rang dans la matrice des souvenirs.
Revenons à notre temps. Le regretté Daniel Lagrèze, en 2011, pilota un groupe d'adeptes du félibrige pour donner à Grives, une devise qui campe sur l'idiome occitan. Elle devait traduire la foi des Grivois dans leur destin. "Grivas sèm. Grivas demorarem" c'est-à-dire Grives existe, Grives perdurera. Cette devise, bien au-delà des configurations administratives, en perpétuelle recomposition, traduit l'esprit frondeur de nos ruraux qui entendent garder leurs entités vivantes et font face aux puissants qui veulent reléguer la ruralité dans un rôle purement subsidiaire.
Un chantier municipal de 148 000 €. C'est un peu dans cet esprit que les équipes municipales de Grives ont voulu, en promouvant une halle rurale, créer un pôle d'accueil où l'on peut, à l'abri des intempéries, se réunir pour festoyer, échanger, voire rétablir le côté foire d'antan. Cette halle d'environ 150 m2 s'inscrit parfaitement dans son décor.
Le chantier conçu par la municipalité mue par Claude Sarrut, a connu bien des difficultés et s'acheva avec l'équipe de Dominique Franc.
Tout chantier mérite, pour valoriser celles et ceux qui l'ont porté, une cérémonie inauguratrice ; et, là, surgit la problématique de la date. C'est donc ce vendredi 29 juin qui a été retenu.
Une sympathique manifestation. Ce jour de Messidor, une cinquantaine de Grivois et d'invités sont donc venus pour sceller dans l'histoire locale, cet espace rural qui donne et donnera une touche vivante au bourg.
Après la rupture du ruban, Dominique Franc, en présence de Claude Sarrut, son prédécesseur, a retracé les périples de cette réalisation. Pour la petite histoire, il rappela que celle-ci a pris son envol après une préconisation quasi impérative de Bernard Musset, un ancien sous-préfet de Sarlat, qui trouva que les conditions de sécurité posaient un réel problème, dans la structure non conforme qu'il découvrit. Le président du conseil départemental a dit que l'entité dordognaise ne connaît pas de petite commune et il a parlé du financement croisé où l'Europe se trouve de moins en moins impliquée. La région, elle, s'inscrit dans des chantiers conséquents, restreint ses latitudes.
Sébastien Lepetit, notre nouveau sous-préfet, revint sur l'aspect sécuritaire et souligna le plaisir qu'il avait de découvrir Grives où la halle permettra d'avoir une vie locale avec ses animations.
Le convivial pot de l'amitié fut le moment de cette clôture au bord du Valech qui, avec ses premières journées franchement estivales, est en voie de voir s'écouler ses dernières gouttes.
Dominique Franc, un maire heureux.
Pour le président Peiro, il faut des partenariats.
Sébastien Lepetit, notre nouveau sous-préfet, n'a rien du sous-préfet impérial immortalisé par Daudet. "Cocher devant, laquais derrière, la calèche de la sous-préfecture l’emporte majestueusement au concours régional de la Combe-aux-Fées. Pour cette journée mémorable, M. le sous-préfet a mis son bel habit brodé, son petit claque, sa culotte collante à bandes d’argent et son épée de gala à poignée de nacre… Sur ses genoux, repose une grande serviette en chagrin gaufré qu’il regarde tristement". Les lettres de mon moulin.
Il n'y avait pas moins de 5 maires des communes voisines [Belvès, Cladech, Doissat, Ste Foy et St Germain] pour inaugurer cette halle. Christian Léothier, maire du Pays de Belvès, a dit, en aparté, qu'il se sentait un peu grivois car c'est à Grives qu'il mit les pieds, au tout début de son approche du Périgord.
Les Grivois sont fiers de leur halle.
Les enfants, aussi.
On peut noter que, dans ce village, le conseil municipal, au tout début de cette mandature, a approuvé l'idée de redonner le nom historique à son ruisseau. Grives a ainsi épousé le choix fait par Sagelat et, très récemment, a été rejoint par Siorac, dans cette renaissance historique. En admettant que le Valech, talweg humide, sorte ce cours d'eau devenu intermittent, de la dérive orthographique vide de sens [la Vallée] qui le priva de son sens initial, les élus grivois ont fait montre d'intérêt à la sémantique et à l'étymologie. Le Valech, en grande souffrance à partir de Messidor, a déjà tari à partir du Cambou, lieudit carvésois. Il paraît probable qu'il va entrer en léthargie sur tout son cours, pour plusieurs mois.
Photos Pierre Fabre.
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Une abonnée me fait remarquer qu'il n'y a, dans ce papier, aucune photo d'ensemble qui représente la halle de Grives. En prenant bonne note et en attendant de corriger cette énorme lacune, Bruno Marty qui observa au début de l'année, l'égarement du Valech, a pris cette image qui donne une idée de la construction à peine achevée qui prenait un bain de pieds.
En janvier, le Valech cerne la halle de Grives.
Photo © Bruno Marty.
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